Publié le :
23/12/2021 15:30:36
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Arrêtons-nous un instant sur une question importante : votre oncle Jean se trompe-t-il quand il dit mieux savoir que vous quel vin est bon et lequel ne l’est pas ? En réalité, il y a de fortes chances pour que son cerveau influence ses sens. Un vin français n’est pas techniquement meilleur qu’une bouteille d’Australie. Mais l’étiquette, la couleur ou encore l’origine vont grandement influer sur notre jugement.
Revenons sur deux expériences scientifiques menées par les chercheurs Gil Morrot, Frédéric Brochet et Denis Dubourdieu à l’université de Bordeaux. Elles visaient à montrer comment certains facteurs ont un impact important sur notre perception du goût d’un vin.
La première étude (1999) ciblait l’impact du conditionnement du vin sur la dégustation. Nos chercheurs ont proposé à 57 étudiants en 2e année d’œnologie de déguster un même vin rouge à 15 jours d’intervalle. Lors de la 1e session, l’étiquette mentionnait « vin de table ». 15 jours après, la même bouteille de vin rouge était étiquetée « grand cru ». Seulement 6 étudiants ont déjoué l’expérience : les autres ont attribué une note plus sévère au vin de table. Voici le PDF de l’étude à télécharger si vous voulez plus de détails sur les résultats.
En 2001, l’étude « Le goût des couleurs » ciblait l’influence du contexte sur la perception d’un vin. Trois vins furent dégustés en 2 sessions : un vin rouge, un vin blanc et le même vin blanc coloré en rouge. La description du vin blancpar une cinquantaine d’étudiants en œnologie fut surprenante. Lors de la comparaison des deux vins blancs censés avoir les mêmes arômes, le blanc avait des arômes de fruits blancs, celui coloré en rouge des arômes de fruits rouges. Pour les curieux.ses, voici le lien vers les résultats de l’étude (en anglais).
Chaque étude montre combien notre cerveau subit ce que les scientifiques nomment le « biais de confirmation d’hypothèse ». Selon le contexte et le vin qu’il pense déguster, le cerveau influence notre perception, nos sens et donc notre jugement. Au-delà de la couleur et du conditionnement, il existe plein d’autres facteurs influençants :
Et que dire de votre mémoire, de votre histoire personnelle, de votre humeur, de votre niveau de fatigue ou d’attention au moment de déguster un vin ? Ou même du bruit ambiant, des accords mets et vins, de la couleur de la nappe, de la forme du verre, de l’ordre de dégustation ou même de la température de service (qu’il est possible de bien choisir néanmoins !) ? Par ces biais, le cerveau peut créer des expériences subjectives et extrêmement variées d’une personne à l’autre, avec des émotions différentes.
Je pourrais encore m’étendre sur la capacité physique de percevoir une odeur, un goût ou des saveurs. Notre nez étant composé de 400 capteurs et de récepteurs différents chez chaque être humain, nous ne sentons pas tous la même chose.
Si vous souhaitez aller plus loin sur le sujet, je vous invite à découvrir le mémoire de recherche mené par Thomas Henriet en 2018, alors étudiant de l’UCL, traitant de la perception du consommateur belge sur le vin. Très instructif sur nos biais de consommation !
Bref, vous l’aurez compris, personne ne détient la vérité sur ce qui est bon et ce qui ne l’est pas, même pas l’oncle Jean. Ce qui compte avant tout est le plaisir personnel, propre à chacun, ressenti à la dégustation de chaque bouteille de vin.
Il est impossible de se soustraire totalement aux attentes, à l’expérience et au contexte. Il y aura donc toujours une part de subjectivité au moment de déguster un vin, surtout si c’est un vin étranger et que vous n’arrivez pas à lire l’étiquette. Heureusement, je suis là pour vous conseiller !
Si vous souhaitez tout de même tenter de limiter les biais d’expérience, voici quelques méthodes, de la moins contraignante à la plus exigeante :
Et vous, avez-vous une autre technique à proposer ?